Natacha BOX
LES DIFFICULTES LIEES AU HAUT POTENTIEL
On constate que près de 50% des élèves haut potentiel (HPI) ou appelés aussi précoces, ressentent des difficultés scolaires, avec au moins 1 année de redoublement. Le repérage et le diagnostic de ces élèves HPI est très insuffisant de nos jours. En effet, ceux qui réussissent brillamment sont souvent mieux repérés et diagnostiqués car ils répondent à l'image que nous attendons d'un HPI.
La question du diagnostique
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Habituellement, on parle de HPI à partir du test d'intelligence de Wechsler (WAIS ou WISC). Le score de 130 est le score retenu pour parler de surdouance. Cependant, de plus en plus, ce score seuil est remis en cause car il existe des biais affectifs et des spécificités cognitives qui peuvent réduire le score global. Le diagnostic se fait en réalité non seulement sur le test mais aussi sur les éléments cliniques. Un diagnostic de HPI peut être envisagé même avec un score global normal au test. Le test de QI est uniquement un indice qui oriente le diagnostic mais il ne fait pas le diagnostic.
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Le fonctionnement intellectuel de la personne haut potentiel
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Etre surdoué signifie faire fonctionner son intelligence autrement. Ce n'est pas un apprentissage. Les personnes naissent avec cette particularité. Ils font des liens très rapides entre des concepts et intègrent très vite ce qu'ils apprennent. Cette rapidité d'intégration fait qu'ils ont l'impression de ne jamais rien savoir.
L'imagerie cérébrale a mis en évidence que les réseaux de neurones sont plus activés chez les personnes HPI qui peuvent avoir du mal à mettre leur tête au repos et appuyer sur le bouton off. La transmission des informations au niveau synaptique se fait de façon plus rapide et se distribuent dans le cerveau de façon multispatiale. Ainsi, ces personnes pensent de façon arborescente et très rapidement. Elles rapportent souvent qu'elles ont du mal à expliquer leur raisonnement et les étapes de leur raisonnement. Souvent, elles savent des choses mais ne savent pas comment ni pourquoi elles les savent.
Il n'est pas rare de voir des élèves se saboter intellectuellement (inhibition intellectuelle) afin d'avoir l'illusion d'être comme les autres. Ils peuvent aller jusqu'à développer une phobie scolaire. Le rapport avec l'apprentissage à l'école et les enseignants peut être compliqué. L'élève HPI ne comprend pas toujours l'intérêt de certains apprentissages, ne comprends pas toujours les implicites de l’école ou les attentes de l'enseignant.
Le besoin de mettre du sens est au centre des préoccupations de la personne HPI. Si l'élève comprend le sens de ce qu'il apprend et que l'enseignant est émotionnellement sécurisant, sa motivation sera renforcée. Dans le cas contraire, il peut se découragé, se dévalorisé et perdre toute motivation.
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Le fonctionnement émotionnel de la personne haut potentiel
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Les personnes HPI sont souvent reconnues comme hypersensibles. Elles réagissent avec beaucoup d'intensité aux informations de l'environnement. L’hyperesthésie (capacité développée de l’ensemble de cinq sens) renforce cette hypersensibilité émotionnelle.
Elles décrivent souvent des situations où elles traitent plusieurs informations en même temps. Lors d'une discussion, elles vont aussi être attentives à l'environnement, écouter les conversations des autres personnes, voir des détails qui chez la plupart des gens passeraient inaperçus.
Du fait d'être un grand récepteur des informations provenant de l'extérieur et du manque de filtre entre elles et l'environnement, les émotions sont exacerbées et parfois débordent. Par ailleurs, elles se font contaminer par les émotions des autres, ce qui les fragilisent psychologiquement et complexifient les relations avec les autres.
Nous constatons régulièrement un écart de maturité entre les capacités intellectuelles et la capacité de gestion des émotions. Les personnes HPI ont besoin d'être reconnues et encouragées afin de ne pas douter sans cesse de leurs capacités et d'arriver à construire une bonne estime d'elles mêmes.
A l'adolescence, si elles n 'ont pas été diagnostiquées et accompagnées, leur construction identitaire sera plus fragile. Nous pouvons voir apparaitre des troubles psychologiques émergés pendant cette période. Ayant une vision du monde assez lucide, ces personnes sont guidées par des sentiments d'injustice qu'ils peuvent avoir du mal à négocier et à accepter. La lucidité exacerbée sur le monde et sur les autres rend difficile la sérénité et la cohérence intérieure.
La personne HPI tente de mettre à distance ses émotions par son intelligence et de ce fait, en cherchant à fuir les émotions trop débordantes, elle peut s'enfermer dans des processus addictifs ou des troubles du comportement. Le sentiment de différence que ressent cette personne est constant. Même si elle construit des relations sociales, elle se sent en décalage et est souvent perçue comme étant spécial ou différente. Elle doit s'adapter sans cesse aux autres, parfois l'amenant à construire un faux-self et l'empêchant d'être complètement la personne qu'elle est. De là, nait des troubles de l'estime de soi et des risques de dépression.
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Souvent, les personnes rapportent leur désir d'être normales, comme les autres et cherchent à rentrer dans une case dans laquelle elles n'arrivent jamais à rentrer. La colère est l'émotion la plus difficile à gérer pour elles en raison des ambivalences que cette émotion provoque. La colère se porte sur soi, sur le monde et son absurdité, sur les autres et leur manque de tolérance ou leur superficialité par exemple.
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Etre HPI est uniquement un mode de fonctionnement parmi d'autres et non une pathologie. Afin d'accompagner au mieux ces personnes, il est primordial de renforcer les formations des professionnels et du personnel éducatif afin de leur permettre au mieux de se développer et se construire avec leurs particularités sans avoir à se cacher.
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